30 octobre 2005

B(erlin)ollywood party !

Une chose en entraînant une autre, je me suis retrouvée hier soir à me déhancher sur les tubes les plus tubesques des derniers films bollywoodiens. Pour expliquer comment tout ça m'est arrivé, il faut revenir à lundi, jour damné qui marque la fin du week end.

Lundi matin, j'ai participé pour la première fois au "Praktikantenprogramm" du AA, ce qui m'a permis d'aller visiter la Chancellerie. Je passe rapidement sur la bâtiment, qui m'a autant déçu que le Bundestag m'avait emballée. En gros, ça ressemble vaguement à un hôtel d'aéroport : c'est joli et moderne, mais froid et impersonnel. Heureusement que je ne serai jamais Chancellière d'Allemagne. En revanche, cette visite m'a permis de faire la connaissance de quelques stagiaires sympas.

Quelques déjeuners de filles et un ciné (Pride and prejudice, sans intérêt mémorable) plus tard, me voilà pleinement intégrée dans la secte des stagiaires. Pour fêter cette intronisation et le début du week end, soirée extrêmement sympathique au non moins sympathique "Zu dir oder zu mir" de la Lychener Strasse pour "fêter" le départ de Timothy, lui aussi très sympathique, bien évidemment.

Lors de la soirée, Mina, une de mes nouvelles super-copines-à-la-vie-à-la-mort-avec-qui-je-peux-enfin-parler-d'autre- chose-de-plus-superficiel-que-la-situation-géopolitique-du-Tadjikistan, me confie son désespoir : le Meena-Club fait une une soirée Bollywood le lendemain, et elle n'a trouvé personne qui soit suffisamment fan de Shahrukh Khan pour l'accompagner. Et soudain, moi qui rêve de voir enfin Devdas en entier, je me suis sentie appelée à aller me déhancher sur Chalak Chalak et autres Dum Maro Dum. Et c'est comme ça que j'ai atterri à la soirée Meena-Club à Kreuzberg (www.meena-club.de).










La soirée était vraiment bien, la musique à la hauteur de mes espérances, mais le plus intéressant était au final les co-fêteurs et leurs différents styles de danse. Mina, pour commencer par mon accompagnatrice, était tout de suite super à l'aise et ses origines afghanes sont vite apparues évidentes ! Il y avait aussi pas mal de "vrais" Indiens, en saris et connaissant toutes les chansons par coeur. Les hommes ont vraiment une étrange façon de danser... surtout quand ils montent sur scène pour faire montre de leurs prouesses artistiques. Il y avait les couples mixtes, qui inversaient pour une soirée les rôles d'autochtones et d'expatriés. Les néo-non-indigènes faisaient de leur mieux pour s'adapter à leur nouvelle culture, parfois en vain. Et surtout, il y avait les plus intéressants : les baba-cools allemands en sandales et saris qui venaient se remémorer leur voyage à Bombay en 1969, dont le style mêlait nostalgie et transe.

Le reste du week end a été moins exotique, mais tout aussi agréable en particulier le festival spontané de musique de rue dans... ma rue, dont je suis actuellement en train de profiter depuis la terrasse ensoleillée de mon café internet (bon, ce n'est pas Bamako non plus, je suis en gros manteau...).

Ma soeur m'a annoncé hier qu'elle m'offrait pour mon anniversaire un petit séjour à Barcelone en sa compagnie entre Noël et le Nouvel An. J'attends vos bonnes adresses avec impatience !

25 octobre 2005

De la hiérarchisation importancielle dans l'actualité allemande

Je sais je sais, ca fait une petit bout de temps que mes empechements technologiques ont entrainé un silence des plus sliencieux. J'en suis navrée, et j'espère pouvoir mettre tres bientot en ligne ma production littéraire du week end.

En attendant de retracer mon emploi du temps de ces 2 ou 3 dernières semaines, voici deux informations hautement capitales pour vous faire patienter.

D'une part, j'ai fait ce matin une découverte de prime importance pour ma bonne compréhension de l'AME allemande. Pour ceux qui se demandent ce qu'est une AME, c'est comme une ame avec-un-accent-circonflexe-sur-le-a-que-je-n'arrive-pas-à-faire, mais en plus gros. Ce matin, en attendant mon tram sous la pluie, j'ai assisté à un évènement du quotidien qui, malgré sons caractère parfaitement... quotidien, m'a interloquée : j'ai découvert comment les poubelles allemandes étaient ramassées par les services municipaux. Alors qu'en France, la séparation de la société en classes perdure parmi certains groupes de la population, 300 ans après la Révolution francaise, l'Allemagne a certes raté sa révolution communiste en 1919, mais son modèle égalitaire est plus poussé en ce qui concerne les éboueurs.

Je m'explique : en France, vous avez le Tiers-Etat des éboueurs, ce sont ceux qui sont debout à l'arrière et à l'extérieur du camion. En hiver, vous vous prenez la pluie, le froid et le vent. En été, vous vous prenez le soleil et l'odeur des ordures en putréfaction accélérée par la chaleur. Été comme hiver, vous etes exposés à tous les dangers. A cote du Tiers-Etat, vous avez la noblesse des éboueurs, ceux qui conduisent le camion. Les éboueurs annoblis sont au chaud et à l'abri des odeurs. Ramasser ou conduire, il faut choisir.

En Allemagne, rien de tout ca. Tous les eboueurs sont sur un pied d'égalité, et pas sur une marche à l'arrière du camion. Non non non non non, car en Allemagne, les ramasseurs sont les conducteurs, et vice versa. Devant chaque poubelle, le camion s'arrete, le conducteur et son passager sortent du camion (équipé, je tiens à le signaler, de portes ultramodernes facon portes de bus), vont chercher la poubelle, vident la poubelle dans la benne, remontent dans le camion et repartent jusqu'à la prochaine poubelle. Je crois que c'est l'un des meilleurs exemples permettant de soutenir la thèse selon laquelle l'URSS a peché par trop de communisme et trop d'égalitarisme : trop d'égalite tue l'efficacité. Et pendant ce temps, les Allemands attendent dans les tramways.

Autre évènement de la plus grande importance au pays de Goethe : Heidi Klum a fini par accoucher, ce qui était prévisible depuis un bout de temps. Elle exhibe donc son bonheur à toute l'Allemagne par l'intermédiaire des couvertures des journaux, qu'elle a de toutes facons l'habitude de fréquenter. Et là, VENGEANCE de la nature, son bébé, qui n'est pas roux (pour les non-peoplistes incultes, elle l'a fabriqué avec le chanteur Seal connu pour son teint d'ébène plus que pour sa blondeur scandinave, l'inverse de Heidi en somme), est d'une laideur absolue. Il ressemble à ce vieux boxeurs des années 70 complétement abruti par une combat, le nez défoncé, les yeux bouffis et à moitié clos. Et en plus, il a des poils partout. Pourtant, pourtant, Heidi doit le trouver à son gout puisqu'elle rayonne de bonheur malgré un vraisemblable baby-blues inévitable :



Il est parfois des petits détails insignifiants qui sont méchamment jubilatoires...

23 octobre 2005

Rattrapage en double décalage

Wow, quasiment deux semaines de récit de vie (trépidante bien évidemment) à rattraper… Difficile de commencer par le début, les souvenirs si frais se mélangent déjà. Je vais donc pouvoir améliorer mon style hautement durassien en déconstruisant sciemment le fil chronologique de mon existence. « Die Kunst, Recht zu behalten » dirait mon vieux copain Schopenhauer.

C'est marrant, je sens que mon intégration dans le système allemand commence réellement à se faire. Un tas de détails le prouvent :
- j'arrive en avance aux réunions car j'ai fini par comprendre que « réunion à 8h45 » ne signifiait pas « on se retrouve vers 8h45 » mais « à 8h45, la réunion commence ».
- je maîtrise mieux le clavier qwerty du bureau que l'azerty de mon mac chéri.
- je comprends et apprécie la subtilité linguistique des mails de Falkie, qui me font enfin rire.
- je mange du fromage au petit-déjeuner avec mon sacro-saint café au lait (parfois).
- je dis mon nom quand je décroche le téléphone avant même de dire allô ou bonjour.

Il me reste encore du chemin à parcourir avant d'être parfaitement allemande ; je n'y peux rien, mais d'entendre la secrétaire me dire, regard hautement réprobateur à l'appui « Sie sind späääääääääät » quand j'arrive dans son bureau à 15h00 (et peut être quelques secondes) alors qu'on avait dit 15h00, ça continue de me crisper. Mais pour une retardée chronique comme moi, c'est formateur. De toute façon, je crois que malgré mes efforts, mes collègues trouvent que je suis l'archétype de la Française. J'ai vaguement entendu une fin de phrase ressemblant à « typisch Französin », et sans vouloir être mégalo, je ne vois pas très bien à qui cette remarque pouvait concerner d'autre dans la salle : en dehors du fait que j'étais la seule Française, j'étais également la seule fille.

Et une autre collègue, qui vient de passer 3 ans en poste à Paris, m'a dit à quel point elle trouvait « parisienne » ma faculté à porter des talons aiguilles en toute occasion. Ce qu'elle ne sait pas, c'est que je vais bientôt arrêter. Car s'il y avait une seule raison pour laquelle je ne devais pas aimer Berlin, je dirais que les petits pavés faisant office de trottoir et les Baustelle omniprésentes font définitivement de cette ville l'ennemie de toute femme en escarpins. Évidemment, c'est un drame local, et je ne comprends pas que les autorités publiques ne se soient pas encore saisies du dossier. Cette remarque, assez insignifiante à la base, de ma collègue a fini par la pousser à développer une théorie dont l'audace intellectuelle justifie pleinement qu'elle figure ici : selon elle, le style des habitants d'une ville serait déterminé par les conditions urbano-géographiques de cette dernière. Le « chic parisien » si réputé ne serait donc pas le résultat de siècles entiers dédiés à la recherche de l'esthétique parfaite, mais à de simples conditions matérielles permettant à celui-ci de s'exprimer. À l'inverse, le style « cool » des Berlinoises, qui ne portent jamais d'escarpins, ne serait dû qu'à l'impraticabilité des trottoirs de la ville. Comme vous pouvez vous en rendre compte par vous-mêmes, les couloirs du Ministère sont une sorte de think-tank (post-moderne, Adalbert ??) extrêmement performant mettant au point chaque jour de nouvelles théories permettant d'affermir la paix dans le monde.

En dehors de ces small talks de couloir - pour lesquelles je commence sensiblement à m'améliorer après des débuts catastrophiques - j'ai eu quelques activités culturelles pleinement satisfaisantes. J'ai eu la chance de visiter « dans le cadre de mes fonctions » (hihihihihihihihi) le Bundestag revisité par Foster. J'ai été plus qu'impressionnée par cette visite. La façon dont l'Histoire, même ses moments les plus noirs, est assumée et utilisée comme force intérieure, la place de premier choix laissée à l'Art et enfin la réussite architecturale de cette transformation font du nouveau bâtiment du Reichstag un monument incontournable de l'identité allemande contemporaine. Chaque élément du Bundestag, qu'il soit ancien et conservé, détruit et absent ou réinventé et flambant neuf, donne du sens à ce qui aurait pu n'être qu'un bâtiment officiel sans intérêt. C'est la première fois que je vois une réalisation architecturale symboliser de façon aussi parlante et matérielle des idéaux moraux tels que la volonté de transparence ou la tolérance. C'est aussi la première fois que je visite un bâtiment officiel qui réussit à m'émouvoir : les murs de la partie ancienne du Bundestag, couverts des graffitis en cyrillique laissés par les soldats soviétiques en 1945, ne peut pas laisser insensible.

Autre activité culturelle de ces derniers jours : j'ai été au cinéma voir ça



et ça



Forcément, ce n'est pas le même genre. Alors que le premier retrace le parcours de deux terroristes kamikazes en Palestine, le deuxième reprend le bouquin pour enfant le plus génial au monde. Pourtant, Mahomet et Roald Dahl ont un point commun : leurs livres respectifs donnent d'excellents films. Pour les dîners mondains, je vous recommanderais plutôt Paradise now, nettement plus facile à recaser dans une conversation spirituelle (même si gros risque de cassage d'ambiance si celle ci était à la légèreté et la frivolité). Pour un samedi après midi pluvieux, Charlie et la chocolaterie est l'antidote parfait à une soudaine morosité. Ca m'a même donné envie de relire pour la 6537ème fois le livre.

J'ai également assuré le financement d'un petit week end à Vienne, Londres ou ailleurs dans les prochaines semaines en faisant la traduction de la communication d'une historienne d'art pour un colloque luxembourgeois sur les œuvres d'art pillées pendant la 2nde Guerre mondiale. Le principal enseignement que j'ai tiré de cette expérience est que la traduction est une occupation plutôt intéressante, relativement peu compliquée et très rémunératrice. Sacrifier deux ou trois soirées de ma semaine pour m'offrir un vrai week end, je trouve ça assez honnête…

Dimanche dernier, petit tour au marché aux puces de Boxhagener Platz avec Eve avant d'aller se réfugier dans un café riquiqui aux propriétaires à moitié dans les cuisines à moitié sur la lune, histoire de prendre un bon chocolat chaud (mit Sahne, il est des habitudes qui ne se perdent pas) et une crêpe « à la russe ». À vrai dire, juste de quoi lutter contre le froid qui commence à envahir les rues berlinoises, porté par un vent mordant venu directement de Sibérie (je présume). Et juste de quoi reprendre des forces pour faire face à une nouvelle semaine de travail.

En réalité, ma semaine a été assez peu productive, étant donné que le Ministère recevait un groupe de jeunes diplomates français, en formation intensive au Goethe Institut et dans l'administration « du pays partenaire », selon l'expression consacrée. Le groupe était vraiment sympa et j'ai fait des rencontres intéressantes. Et je me suis rendu compte à quel point il était finalement plus facile de parler en français plutôt qu'en allemand. Nous avons été dîner dans l'un des meilleurs restos de la Kollwitzplatz, Zander, absolument hors de mes moyens (même après la traduction), mais néanmoins tout à fait recommandable (quand on peut s'y faire inviter). Le réveil a été plutôt douloureux le lendemain matin après cette délicieuse soirée, ses délicieuses conversations et son délicieux vin blanc.

Un resto indien en bonne compagnie hier soir m'a permis de clore cette semaine en beauté. Le programme de demain mêle tradition (le brunch du dimanche matin) et innovation (je vais tenter d'obtenir des Restplätze au Staatsoper pour voir le Cosi fan tutte mis en scène par Doris Dörrie).

Je vous laisse sur une remarque à méditer. Etant donné sa portée, je m'abstiendrai de fournir un quelconque renseignement sur le contexte et l'auteur : « Tu sais, on n'épouse pas toujours une femme parce qu'elle est intelligente » (en parlant de la sienne).

08 octobre 2005

Finalement…

Finalement, ce n’était pas si horrible que ça cette petite sauterie péruvienne. Au contraire, c’était même très agréable. En réalité, ma plus grande crainte (inavouée) était de rester esseulée comme un palmier en pot dans une grande pièce.

Mais l’un de mes collègues du Ministère, qui fait partie du staff du Diplomatischer Stammtisch, m’a tout de suite présenté d’autres nouveaux débarqués, qui redoutaient sans doute autant que moi l’effet palmier en pot et qui étaient vraiment sympas.

J’ai en particulier rencontré deux jeunes Américains qui font un programme d’échange d’un an au sein du Ministère et qui sont des gens vraiment intéressants (oui oui, ça existe). Le premier que j’ai rencontré est en fait d’origine chinoise et ferait passer Nadine de Rotschild pour une pouffe sans éducation ni bonnes manières tant il est attaché aux règles les plus recherchées du savoir-vivre. Il en est presque déroutant, mais on prend rapidement l’habitude :) Là où l’histoire devient cocasse, c’est que j’ai failli habiter avec lui : j’avais repéré une annonce pour une chambre alors que j’étais encore en France, et lorsque j’étais arrivée à Berlin, la chambre avait déjà été donnée à une autre candidate. Et nous aurions même dû nous rencontrer plus tôt puisque nous avons habité au même moment à quelques mètres d’écart… à Vienne !! Si en plus de tout ça il était follement sexy, je suis certaine que je croirais à un signe énorme du destin. Comme ce n’est pas le cas, je trouve juste que les coïncidences sont des clins d’œil de la vie. Comme quoi, on ne croit que ce qu’on veut croire et on n’interprète que ce que l’on a envie d’interpréter.

Par exemple : je rencontre un charmant Néerlandais (oui encore un... Je n’y peux rien, ils sont partout et tous tellement… charmants) lors de mes visites de WG. Trop préoccupée par mes recherches immobilières, j’en oublie l’ABC de la survie sentimentale et je pars sans son n° de téléphone ni même son prénom. Une semaine plus tard, devenue sa voisine par la force du destin (SI SI SI SI !), je le recroise dans un lieu hautement romantique, le LIDL du coin (Charles, ouvre les yeux pour les Polonaises la prochaine fois que tu vas faire les courses !!). Et je ne peux pas m’empêcher de me dire que CA NE PEUT PAS être le hasard. Il n’est pas rationnellement concevable que nous ayons décidé de façon totalement indépendante d’aller faire nos courses le même jour, à la même heure, au même endroit. Cette rencontre est forcément quelque part l’œuvre d’une force supérieure. Et pourtant si, ça peut être le hasard. C'est meme sur que c'est le hasard. Un hasard bien organisé quand même, mais un hasard pas improbable. Soit dit en passant, comme j’ai été un peu prise au dépourvu, je suis encore repartie sans son n° ni son prénom malgré une discussion passionnante entre le rayon des pizzas surgelées et celui du café. La troisième fois sera la bonne. Je maintiens donc : on ne croit que ce qu’on veut croire et on n’interprète que ce que l’on a envie d’interpréter.

Pour en revenir à l’Ambassade péruvienne, le deuxième américain est aussi très sympa, bien que nous n’ayons pas autant de points communs dans nos chemins de vie. Pour fêter notre nouvelle amitié transatlantique, nous avons toutefois déjeuné ensemble aujourd’hui avec deux autres jeunes et fringants diplomates allemands. Je commence donc doucement à m’intégrer à la communauté diplomatique berlinoise :) Je suis même inscrite dans la liste du programme pour stagiaires du Ministère depuis cet après-midi. Une bonne chose de faite avant de partir l’esprit tranquille et le cœur léger en week end !

Je suis désolée de mettre d’un seul coup les récits de toute une semaine. Je devrais avoir plus de précisions lundi sur les possibilités d’accès à internet au Ministère et j’espère que je pourrai alors me connecter plus souvent et me remettre à ajouter de (jolies) photos !

06 octobre 2005

Les choses sérieuses

Mardi matin, réveil à 6h30 (wouch, ça faisait longtemps), de bonne humeur. Moitié envie folle d’aller travailler, moitié envie encore plus folle de prolonger les vacances…. Vu que je n’avais toujours pas de café chez moi et même plus de lait pour mes Smacks (sacrilège), j’ai joué à la parfaite Française de Berlin nostalgique dans la boulangerie en bas de chez moi : un « coffee to go » dans une main pour le côté berlinois, et un croissant au beurre tout chaud dans l’autre, à savourer dans le tram.

Première bonne surprise de la journée : je mets à peine 20mn pour aller au bureau, ce que je considère comme un temps record des plus acceptables. Dans ces conditions, je veux bien y aller tous les matins.

Deuxième bonne surprise : mes collègues sont vraiment tous adorables avec moi, des teutons absolument charmants à vrai dire. Bon, ce sont de grosses masses intellectuelles, ça impressionne, mais ça ne les empêche pas d’être sympas et marrants.

Troisième bonne surprise : j’ai retrouvé un « collègue » allemand très sympa que j’avais rencontré lorsqu’il était en poste à Vienne, qui est revenu à Berlin depuis peu et avec qui je vais travailler pour un dossier. Du tout bon !

Quatrième bonne surprise : le réseau de stagiaires a l’air particulièrement actif et dynamique. Il y a quasiment tous les jours quelque chose d’organisé. Ça tombe bien, parce que je sens que ce n’est pas avec la secrétaire (dont l’âge présumé lors de mon dernier post s’est confirmé, puisqu’elle m’a confié avec des yeux brillants d’impatience et de fierté qu’elle partait à la retraite en avril) que je vais pouvoir me faire des pauses café du tonnerre. Agnete (c’est son petit nom) ne sera définitivement ni Nathalie, ni Martine, ni Joëlle…

Cinquième point positif : il n’y a rien de mieux après une bonne journée de travail que de se mettre dans un bain chaud avec une tasse de Melissentee et Radio Multikulti en fond sonore (c’est LA radio de Berlin, c’est comme Nova, mais en mieux, parce qu’ils ne se prennent pas pour les seuls et uniques garants du bon goût musical).

Quelques points négatifs quand même :
- il est confirmé que je ne serai pas toute seule dans mon bureau, ce qui n’est pas EN SOI un drame. Mais j’ai juste été un tout petit peu traumatisée par ma collègue de Vienne. J’ai plein de témoins qui pourront confirmer qu’elle était VRAIMENT horrible, si jamais vous étiez tentés de penser que je suis simplement trop sensible !
- je n’ai pas accès à internet et les correspondances privées ne sont pas particulièrement encouragées avec le mail du ministère. D’ailleurs, j’ai essayé (bah oui, on sait jamais) et je ne recommencerai pas. À peine mon mail – assez anodin malgré tout – avait il été envoyé que je recevais une alerte me signifiant qu’il ne pourrait être transmis à son destinataire car le système de vérification automatique avait repéré qu’il contenait des informations qui ne pouvaient être communiquées à l’extérieur du ministère. Mais que si je tenais vraiment à l’envoyer, c’était possible en insérant un code dans l’objet du mail, mais que celui-ci serait conservé pendant 10 ans et pourrait être utilisé à n’importe quel moment par les services secrets dans le cadre d’une enquête. Honnêtement, ça donne super envie d’envoyer le mail !! Si on ajoute à cela que j’ai appris de source sure qu’un mec travaillant au Ministère de la Défense (allemand) allait passer en conseil de discipline après avoir été dénoncé par un de ses collègues parce qu’il avait envoyé un mail personnel du bureau, vous comprendrez mon silence mailistique dans les 5 prochains mois !!!!
- les journées sont un peu longues. Pas parce que je m’ennuie, mais parce que 8h-19h avec une pause déjeuner riquiqui (tout est relatif), ça fait quand même 10h… Et sans vouloir jouer au petit fonctionnaire calculateur de temps de travail, ça latte bien et ça ne laisse pas vraiment de place à une vie épanouie à côté. J’espère que mon chef va bientôt revenir à la raison (et aux horaires allemands).

Pour continuer dans les histoires de parano du Ministère, j’ai signé ce matin un document de 4 pages m’expliquant toutes les peines auxquelles je m’expose si jamais je révèle le moindre petit truc à la moindre petite personne. Pour signer ces papiers, j’ai eu droit à une cérémonie très solennelle en tête à tête avec mon chef avec un discours d’un quart d’heure dont il ressort principalement que :
- je peux accepter une voire deux invitations à déjeuner d’une même personne, mais qu’au-delà, ça devient suspect et que je dois lui demander son avis (et son autorisation)
- je dois fermer mon bureau à clef même quand je vais me repoudrer le nez, histoire qu’on ne me vole aucun document
- je ne dois pas essayer d’en savoir plus que nécessaire à la réalisation de ma tâche
- je ne dois parler à personne de mon travail en dehors de mes 7 collègues diplomates
- et pour être certaine que je révèle vraiment rien, ce serait encore mieux si je ne parlais à personne.
Je pense qu’il s’est senti obligé de particulièrement insister sur cette procédure, vu que je fais un peu Mata Hari ici. Mais ça m’a mise vraiment mal à l’aise cette discussion. Donc à partir d’aujourd'hui, je peux jouer à l’agent secret et vous balancez, si vous me posez des questions que ce que je fais, « désolée, top secret, je suis contrainte au silence par le Verpflichtungsgesetz ». Ils font parfois un peu peur les gens parfois !!!!

Pour oublier un peu la pression qui pèse sur mes frêles épaules, je vais aller divulguer quelques uns des nombreux secrets d’Etat que je détiens d’ores et déjà à l’Ambassade du Pérou où j’ai été conviée à venir me saouler aussi dignement que possible au pisco (OUIIIIIIIIIIIIIIII, du vrai pisco péruvien Tina, tu ne rêves pas !!! Pour Juliette : c’est la boisson que Marion avait préparée pour son pot de départ de la Mission, mais en meilleur… Oups, je crois que je viens tout à fait involontairement de languedeputer…) et à rencontrer le gratin des jeunes diplomates en poste à Berlin. J’ai eu un peu peur. Je m’attends à une vague mélange entre :
- un grand « Tournez manèges » international visant à aider la formation de brillants couples de jeunes diplomates esseulés
- une réception d’ambassadeurs guindée (sans Ferrero rochers ni copines avec qui boire plein de champagne comme au 14 juillet. Zut, c’est vrai, j’ai oublié que nous étions là en service pour écouter la Marseillaise, suis-je bête !)
- un pot d’ambassadeurs guindé avec des tas de discours dont personne n’a rien à faire, pas même le mec qui parle (surtout pas le mec qui parle).

C’est parti, je vais me jeter dans la fosse aux lions diplomatique… et faire attention à ne pas trop boire pour ne révéler aucun secret d’Etat (article 95 du Code pénal : je risque jusqu’à 10 ans de prison. Il ne faut pas croire que la vie n’est pas périlleuse à Berlin).

« Heute haben wir den 3. Oktober… »

Ce week end était un loooooooooooong week end grâce au lundi férié pour fêter la réunification allemande. Comme prévu, je suis allée faire un petit tour en Suède. Enfin, façon de parler, parce que je ne suis pas sure qu’au regard du droit diplomatique en vigueur, Ikea bénéficie réellement du même statut que les ambassades et les magasins soient considérés comme un petit morceau de territoire suédois à l’étranger (malgré leurs efforts visuels pour coller avec le drapeau). C’est en tous cas bien dommage car je trouve nettement plus classe de dire qu’on vient de passer le week end en Suède plutôt que d’avouer qu’on a passé son dimanche après-midi chez Ikea, agglutinée à la foule en délire qui a eu la même idée que nous…

Donc j’ai été chez Ikea et j’ai bénéficié d’un traitement particulier puisque Michael et Cornélia avaient emprunté la GROSSE voiture parentale pour se procurer les derniers éléments de leur collection de placards (si je divulgue des informations trop intimes sur mes amis, qu’ils me pardonnent, pitié) et j’ai donc eu droit à un service de livraison à domicile pour ma toute nouvelle étagère et les diverses accessoires absolument nécessaires à mon bien être.

Après la livraison a bien évidemment suivi le montage du meuble Ikea (mon premier toute seule !!!) et j’avoue que je suis assez fière d’avoir réussi à faire un truc aussi beau toute seule, avec mes deux mains et mes presque 10 doigts. Je dis « presque » mais n’allez pas croire qu’il m’en manque, à l’image de la copine polonaise d’un copain d’une copine, fille de chimistes (ce qui a sans doute son importance) et qui a visiblement souffert d’irradiations durant sa gestation puisqu’elle totalise un ensemble de 7 doigts répartis (inégalement, cela va de soi) sur deux mains. Donc non, j’ai 10 doigts, mais vous aurez sans doute remarqué qu’il y a toujours des doigts que l’on n’utilise pas pour bricoler (ce qui doit consoler la copine polonaise du copain de ma copine).

BREF, revenons en à mon étagère Ikea, qui est quand même la 7304ème merveille mondiale inscrite au patrimoine mondiale de l’humanité de la SOPHISCO (c’est comme l’UNESCO, mais en moins international). Certes, ce ne sont que 5 planches et deux morceaux de bois brut faisant office de soutiens, d’où son prix modeste. Mais quand même, je la trouve vachement belle et puis « c’est moi qui l’ai faite !!! ». Donc après quelques menus achats, ma chambre est devenue définitivement ce havre de paix accueillant et chaleureux qu’on a (parfois) envie de retrouver le soir.

Et lundi, c’était le fameux 3. Oktober. Et je ne résiste pas au plaisir de vous faire part d’un petit dialogue entendu à la radio à cette occasion, mi doux mi amère, qui résume (d’après ma perception) finalement pas mal l’état d’esprit de beaucoup d’Allemands 15 ans après la réunification :

- Was für einen Tag haben wir heute ?
- Den 3. Oktober ! Es ist der Tag der Wiedervereinigung…
- Und glaubst wirklich, wir sind vereinigt nun ?
- Na ja… schon !
- Sag mal, seit wann gibt es Ossi-Witze ?
- Seit der Wiedervereinigung !
- Siehst du…

Un peu de compassion pour les non-germanophones :

- On est quel jour aujourd'hui ?
- Le 3 octobre ! C’est le jour de la réunification…
- Et tu crois vraiment qu’on est unis maintenant ?
- Bah… oui, quand même
- Dis moi, depuis quand y a des blagues sur les Allemands de l’Est ?
- Depuis la réunification !
- Tu vois…

01 octobre 2005

Des nouvelles (au péril de ma vie ??)

Ca y est, j’ai emménagé et je profite depuis jeudi soir de ma chambre preque luxueuse dans mon appartement super luxueux… Quelques inconvénients quand même depuis que ma coloc est partie aux Etats Unis pour deux mois : elle a suspendu son abonnement à internet et a débranché le téléphone. Je suis donc un peu coupée du monde moderne. Le bon côté, c'est que je vais sans doute me désintoxiquer d'une bonne partie de mes addictions et que je vais me remettre à lire (des livres, pas Cosmopolitan) comme quand j'étais jeune et un peu cultivée.

Mais comme je ne suis pas encore désintoxiquée, et pour être en phase avec mon époque, je me suis dirigée vers un café doté du sigle « kabellos online Hot spot ». Et là, pas de chance : le propriétaire, bien que malheureusement affublé d’un bec de lièvre le rendant difficilement compréhensible, a réussi à me faire saisir qu’il n’avait plus de carte d’accès. En revanche, il m’a TRES GENTIMENT proposé, après s’être assis contre moi sur la banquette de son café, de descendre dans la « Keller » (la cave) où il a son bureau. Parce que chez lui, il a un accès à internet. Bizarrement, vu sa tête d’ancien de la Légion étrangère, j’ai préféré décliner l’invitation. Et j’attendrai le prochain café doté de WLAN pour mettre mon récit en ligne !!

Tiens, le propriétaire vient de revenir à la charge pour me proposer de venir travailler dans son bureau. Et me dire que le client de la table d’en face, qui semble aligner les bières et les cigarettes depuis le début de la matinée, a LUI AUSSI un bureau juste à côté et que je peux sans problème monter chez lui pour me connecter si je veux. Clin d’œil appuyé du client sus-nommé quand je le remercie poliment en déclinant son invitation et rires grivois avec le patron. J’aime !!!

J’ai rencontré mon chef hier et ma première expédition au Ministère a été plutôt sympa. Mon bureau sera dans l’ancien bâtiment dont le hall d’entrée (majestueux) ressemble furieusement à celui du palais de Ceausescu (avec la réserve que le marbre y est bordeaux et non pas blanc). Un joyau de l’art étatique soviétique…

Le « Arbeitsstab Frankreich » est composé d’une petite dizaine de personnes. Moyenne d’âge 35 ans avec une bonne grappe de conseillers au début de la trentaine. Il n’y a bien évidemment qu’une femme, la secrétaire (qui elle, tire plus vers l’âge de la retraite : ce n’est pas elle qui me fera découvrir les boîtes à salsa comme l’avait fait Nathalie à Vienne !!!!). Mon chef est vraiment très sympa au premier abord. Comme tous les diplomates allemands que je connais, il est marié à une Française. Et sa fille vient d’être prise à Nancy. Comme le dit si justement et si cyniquement mon amie Raphaëlle : « Le monde est petit, surtout le nôtre ».

J’ai également rencontré un Français responsable de la coopération franco-allemande (dont je tairai l’identité pour ne pas me griller tout de suite) qui parle tellement bien allemand (!!) qu’il demande systématiquement si on peut mener les entretiens en français en sa présence. Je suis parfois prise de doutes existentiels quant au fonctionnement de la fonction publique française… Comment peut on être nommé à Berlin sans parler allemand ? Parce qu’il est certes très sympathique, mais est ce qu’il n’y avait vraiment personne d’autre de qualifié ET germanophone pour son poste ??

Cette première rencontre avec mes futurs collègues m’a également permis de préciser un peu mon programme de travail pour les prochains mois. En gros, mon gros dossier va consister en l’organisation d’une journée portes ouvertes dans les entreprises allemandes en France (et inversement) afin de motiver les jeunes dans l’apprentissage de la « langue du partenaire » en leur montrant les applications pratiques de cet apprentissage. Bon, comme ça, ça n’a pas l’air très clair, mais pour faire simple, il faut réussir à convaincre les entreprises de consacrer une journée à des élèves, et convaincre les écoles de laisser une journée de libre aux élèves. En somme, il faut convaincre tout le monde qu’il s’agit, comme l’a dit mon chef, d’une « win win situation » (Grand gourou Pélissier, nous te vénérons).

La mauvaise nouvelle, c’est que les journées de travail commencent à 8 heures (et que je partage mon bureau avec un Suisse. Mon Dieu, faites en sorte que la ponctualité suisse soit un mythe…). L’autre mauvaise nouvelle, c’est que je suis repartie avec un dossier d’une centaine de pages à lire d’ici mardi matin. Encore heureux que le 3 octobre soit férié ici… Mais Cornelia a raison : « c’est toi qui as voulu rencontrer ton chef avant, maintenant, tu assumes ! » ☺

Hier soir, c’était soirée fondue chez Michael et Cornelia avec Dirk, le stagiaire préféré de Cornelia au Ministère de la Défense. Comme prévu, un moment très sympa, même si Michael nous a tous lattés au quizz des capitales.

Bon, ça y est, me voilà posée dans un autre café, bien plus recommandable cette fois ci. Remarquez, l’avantage quand on se fait draguer par un vieux légionnaire patron de café, c’est qu’on ne paie pas son Milchkaffee. Et pourtant, je vous jure que je ne suis pas allée dans sa cave !!!

Outre la lecture de mon pavé sur la coopération franco-allemande, le reste de mon week end va sans doute être consacré à une petite virée chez Ikea (je n'aime pas les Suédoises, mais j'aime bien Ikea), histoire de rendre ma chambre réellement habitable... Et à partir de mardi, les choses sérieuses commencent !! Je sens déjà que je vais rentrée claquée après avoir travaillé toute la journée en allemand.

Merci à tous les fidèles commentateurs (et surtout commentatrices d'ailleurs !!). C'est promis, je vais me remettre à vous écrire des mails persos :)