06 octobre 2005

Les choses sérieuses

Mardi matin, réveil à 6h30 (wouch, ça faisait longtemps), de bonne humeur. Moitié envie folle d’aller travailler, moitié envie encore plus folle de prolonger les vacances…. Vu que je n’avais toujours pas de café chez moi et même plus de lait pour mes Smacks (sacrilège), j’ai joué à la parfaite Française de Berlin nostalgique dans la boulangerie en bas de chez moi : un « coffee to go » dans une main pour le côté berlinois, et un croissant au beurre tout chaud dans l’autre, à savourer dans le tram.

Première bonne surprise de la journée : je mets à peine 20mn pour aller au bureau, ce que je considère comme un temps record des plus acceptables. Dans ces conditions, je veux bien y aller tous les matins.

Deuxième bonne surprise : mes collègues sont vraiment tous adorables avec moi, des teutons absolument charmants à vrai dire. Bon, ce sont de grosses masses intellectuelles, ça impressionne, mais ça ne les empêche pas d’être sympas et marrants.

Troisième bonne surprise : j’ai retrouvé un « collègue » allemand très sympa que j’avais rencontré lorsqu’il était en poste à Vienne, qui est revenu à Berlin depuis peu et avec qui je vais travailler pour un dossier. Du tout bon !

Quatrième bonne surprise : le réseau de stagiaires a l’air particulièrement actif et dynamique. Il y a quasiment tous les jours quelque chose d’organisé. Ça tombe bien, parce que je sens que ce n’est pas avec la secrétaire (dont l’âge présumé lors de mon dernier post s’est confirmé, puisqu’elle m’a confié avec des yeux brillants d’impatience et de fierté qu’elle partait à la retraite en avril) que je vais pouvoir me faire des pauses café du tonnerre. Agnete (c’est son petit nom) ne sera définitivement ni Nathalie, ni Martine, ni Joëlle…

Cinquième point positif : il n’y a rien de mieux après une bonne journée de travail que de se mettre dans un bain chaud avec une tasse de Melissentee et Radio Multikulti en fond sonore (c’est LA radio de Berlin, c’est comme Nova, mais en mieux, parce qu’ils ne se prennent pas pour les seuls et uniques garants du bon goût musical).

Quelques points négatifs quand même :
- il est confirmé que je ne serai pas toute seule dans mon bureau, ce qui n’est pas EN SOI un drame. Mais j’ai juste été un tout petit peu traumatisée par ma collègue de Vienne. J’ai plein de témoins qui pourront confirmer qu’elle était VRAIMENT horrible, si jamais vous étiez tentés de penser que je suis simplement trop sensible !
- je n’ai pas accès à internet et les correspondances privées ne sont pas particulièrement encouragées avec le mail du ministère. D’ailleurs, j’ai essayé (bah oui, on sait jamais) et je ne recommencerai pas. À peine mon mail – assez anodin malgré tout – avait il été envoyé que je recevais une alerte me signifiant qu’il ne pourrait être transmis à son destinataire car le système de vérification automatique avait repéré qu’il contenait des informations qui ne pouvaient être communiquées à l’extérieur du ministère. Mais que si je tenais vraiment à l’envoyer, c’était possible en insérant un code dans l’objet du mail, mais que celui-ci serait conservé pendant 10 ans et pourrait être utilisé à n’importe quel moment par les services secrets dans le cadre d’une enquête. Honnêtement, ça donne super envie d’envoyer le mail !! Si on ajoute à cela que j’ai appris de source sure qu’un mec travaillant au Ministère de la Défense (allemand) allait passer en conseil de discipline après avoir été dénoncé par un de ses collègues parce qu’il avait envoyé un mail personnel du bureau, vous comprendrez mon silence mailistique dans les 5 prochains mois !!!!
- les journées sont un peu longues. Pas parce que je m’ennuie, mais parce que 8h-19h avec une pause déjeuner riquiqui (tout est relatif), ça fait quand même 10h… Et sans vouloir jouer au petit fonctionnaire calculateur de temps de travail, ça latte bien et ça ne laisse pas vraiment de place à une vie épanouie à côté. J’espère que mon chef va bientôt revenir à la raison (et aux horaires allemands).

Pour continuer dans les histoires de parano du Ministère, j’ai signé ce matin un document de 4 pages m’expliquant toutes les peines auxquelles je m’expose si jamais je révèle le moindre petit truc à la moindre petite personne. Pour signer ces papiers, j’ai eu droit à une cérémonie très solennelle en tête à tête avec mon chef avec un discours d’un quart d’heure dont il ressort principalement que :
- je peux accepter une voire deux invitations à déjeuner d’une même personne, mais qu’au-delà, ça devient suspect et que je dois lui demander son avis (et son autorisation)
- je dois fermer mon bureau à clef même quand je vais me repoudrer le nez, histoire qu’on ne me vole aucun document
- je ne dois pas essayer d’en savoir plus que nécessaire à la réalisation de ma tâche
- je ne dois parler à personne de mon travail en dehors de mes 7 collègues diplomates
- et pour être certaine que je révèle vraiment rien, ce serait encore mieux si je ne parlais à personne.
Je pense qu’il s’est senti obligé de particulièrement insister sur cette procédure, vu que je fais un peu Mata Hari ici. Mais ça m’a mise vraiment mal à l’aise cette discussion. Donc à partir d’aujourd'hui, je peux jouer à l’agent secret et vous balancez, si vous me posez des questions que ce que je fais, « désolée, top secret, je suis contrainte au silence par le Verpflichtungsgesetz ». Ils font parfois un peu peur les gens parfois !!!!

Pour oublier un peu la pression qui pèse sur mes frêles épaules, je vais aller divulguer quelques uns des nombreux secrets d’Etat que je détiens d’ores et déjà à l’Ambassade du Pérou où j’ai été conviée à venir me saouler aussi dignement que possible au pisco (OUIIIIIIIIIIIIIIII, du vrai pisco péruvien Tina, tu ne rêves pas !!! Pour Juliette : c’est la boisson que Marion avait préparée pour son pot de départ de la Mission, mais en meilleur… Oups, je crois que je viens tout à fait involontairement de languedeputer…) et à rencontrer le gratin des jeunes diplomates en poste à Berlin. J’ai eu un peu peur. Je m’attends à une vague mélange entre :
- un grand « Tournez manèges » international visant à aider la formation de brillants couples de jeunes diplomates esseulés
- une réception d’ambassadeurs guindée (sans Ferrero rochers ni copines avec qui boire plein de champagne comme au 14 juillet. Zut, c’est vrai, j’ai oublié que nous étions là en service pour écouter la Marseillaise, suis-je bête !)
- un pot d’ambassadeurs guindé avec des tas de discours dont personne n’a rien à faire, pas même le mec qui parle (surtout pas le mec qui parle).

C’est parti, je vais me jeter dans la fosse aux lions diplomatique… et faire attention à ne pas trop boire pour ne révéler aucun secret d’Etat (article 95 du Code pénal : je risque jusqu’à 10 ans de prison. Il ne faut pas croire que la vie n’est pas périlleuse à Berlin).

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Permettez moi de corriger :

La révélation de secrets d'Etat n'est pas couvert par l'article 95 du code pénal.

Sont réprimées, tout d’abord, les atteintes au secret de la défense nationale : art. 413-6, 413-9, 414-5, 414-7 du Code pénal. Le secret défense n’étant pas réellement défini, malgré la loi du 8 juillet 1998, le juge a toute latitude pour condamner. Sont ensuite punies les atteintes au secret professionnel : art. 226-13, 226-14, 226-22, 226-24 du Code pénal. Les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel visé par le Code pénal en tant que dépositaires de renseignements concernant ou intéressant des particuliers, mais cette obligation n’est pas absolue. La révélation de secrets est permise pour prouver son innocence, ou lorsque la personne intéressée a donné son autorisation. La révélation de secrets est parfois obligatoire ( cf. notamment art. 40 et 109 du Code de procédure pénale )

Mademoiselle Coco a dit…

Code penal allemand PATATE (il ne faut pas essayer de jouer au plus fin avec moi)